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vendredi 6 juin 2008

Une nouvelle inachevée?

Les deux gamins couraient, ils s'échappaient tous les deux. Il tenait sa main l'entraînant dans les profondeurs des bois, où l'eau coulait doucement dans un petit ruisseau d'eau limpide et pure. Elle courait derrière lui, le souffle court, haletant. Elle le suppliait d'arrêter sa course folle à travers les bois pour lui échapper à Elle. Elle n'entendait plus les affreux rires sortant de la gorge de leur bourreau.

« Arrête, je t'en prie, je ne peux plus... »

La course ralentit, ils étaient au petit ruisseau, tous les deux couverts de sueurs, leur tunique de tissu miteux leur collait à la peau, laissant profiler la féminité naissante de la jeune fille. Elle se mit à pleurer, cette course l'avait épuisée et affolée, leur bourreau la terrorisait et elle regrettait de s'être enfui avec lui, un peu plus âgé qu'elle, d'ailleurs on le voyait à la fine musculature qui se profilait à travers le tissu collé à la peau. Il se rapprocha d'elle, à peine essoufflé, plus habitué à la condition sportive que la jeune fille, et la serra contre lui, essayant de la réconforter avec de légères caresses dans le dos, et des mots timides, dans sa maladresse d'adolescent.

Plus loin, Elle sentait leur odeur à travers le vent et les feuillages, Elle les suivait à la trace, bien qu'ils couraient sur le sol, éclairés par la lueur des deux lunes pleines, et qu'Elle parcourait les bois de branches en branches, aussi lestement et rapidement qu'un écureuil. Au début Elle riait, pour effrayer les deux adolescents, mais Elle finit par arrêter son petit jeu pour les avoir enfin.

A présent, Elle les épiait du haut d'une branche, camouflée par les feuillages épais. La fillette était collée à l'adolescent. Leurs ombres se profilaient sur le sol, précises grâce à la lumière des lunes qui filtrait à travers les feuilles. Elle voyait deux mains caresser sur le dos de la jeune fille dont les épaules convulsaient au rythme des sanglots.

« Pars. Laisse-moi, enfuie-toi, je me débrouillerai le temps que tu reviennes, plus fort. »

Elle le regarda dans les yeux, devant pour cela lever la tête, plus petite.

« Non, je ne te laisserai pas, qui sait ce qu’Elle te fera quand elle te retrouvera. »

Des larmes coulaient le long des joues de l’adolescente. D’une main, il caressa sa joue droite. Elle regardait toujours de sa branche la scène entre les deux adolescents, ne sachant pas s’il fallait les effrayer à nouveau pour continuer son jeu ou les attraper tout de suite.

Elle se pencha légèrement en avant, dévoilant ainsi son visage à la clarté des lunes. Elle émit un petit rire et le jeune homme se fléchit comme pour bondir tel une gazelle tandis que la fille se raidissait de terreur. D’un bond, Elle descendit de sa branche, une lueur brillant dans sa main. Ses yeux flamboyaient comme le brasier naissant dans sa paume. Un sourire lui étira les lèvres. Voyant que c’était peine perdue, le jeune homme se raidit à son tour, protégeant de son corps la fillette dont les larmes recommençaient à inonder les joues.

« Bien. C’est mieux ainsi. »

Elle s’approcha lentement du couple de fuyards, les observant, toujours le brasier dans les mains et le sourire narquois aux lèvres.

« Mmm… Dois-je vous couper une jambe pour vous empêcher de fuir? »

La jeune fille eu un hoquet de terreur qui fit La rire. Elle s’approcha du visage de l’intéressée et de la main libre lui fit tourner la tête de manière à ce qu’elle puisse la regarder dans les yeux.

« Va t’asseoir, petit chien. »

Le jeune homme se retourna vers sa tortionnaire et la regarda d’un air pitoyable. Toujours baissée, Elle tourna la tête vers l’adolescent et de ses yeux noirs elle dit fermement :

« Assis ! »

Sa volonté de fuir disparut en voyant son amie entre Ses mains fermes. Il alla s’asseoir docilement, le dos contre un tronc, la tête baissée, les mains pendantes par-dessus ses genoux, soumis. La fillette tremblait, terrorisée. Elle tourna son regard dans celui de l’adolescente lorsque le jeune homme fut assis.

« Mignonne. »

Elle délivra le visage de la fillette, desserrant ainsi l’emprise de ses doigts sur sa mâchoire laissant des traces rouges à l’emplacement de ceux-ci.

« Tu pourras me servir de catin. »

A ce mot le jeune homme leva la tête, les dents serrés, le regard noir. Elle le regarda lui aussi, de loin.

« Du caractère et l’esprit dominant. »

La haine de son regard se changea en surprise, mais rapidement Elle reprit un ton ferme et une attitude menaçante. Attrapant d’un geste rapide et précis le bras de la fille, elle la fit se diriger vers le garçon.

« Assis-toi là. »

Serrant le poing, le brasier qui s’y était logé diminua et finit par mourir. Elle s’assit en tailleur à quelques mètres des deux jeunes gens et les regarda quelques minutes sans ne rien dire. Puis elle fera les yeux, mit ses deux index contre ses lèvres, ses coudes posés sur ses genoux, dans une position de réflexion. Lorsqu’elle rouvrit ses yeux, ils étaient totalement noirs. Le jeune homme le vit tout de suite, mais ne savait pas ce que cela pouvait annoncer.

« Qu’est-ce qui t’as pris de t’enfuir de la sorte et d’emmener ton amie avec toi ? Inconscience ? Es-tu dénué d’intelligence, petit imbécile ? Croyais-tu sérieusement pouvoir t’enfuir dans Ma forêt ? Celle que je foule depuis que j’ai appris à marcher ? Sais-tu combien de temps cela fait ? Je ne crois pas, pauvre idiot. »

Elle regarda de nouveau la fille et changea de position, se penchant légèrement en avant et posant ses deux mains au sol devant elle.

« Et toi, sombre idiote ? Peureuse comme tu es, pourquoi l’avoir suivi ? Sais-tu ce qu’il en coûte aux fillettes comme toi ? Je ne crois pas, sinon tu ne l’aurais pas fait. »

L’adolescente regarda la femme d’un air interrogateur, sa peur s’échappait un peu, voyant qu’Elle n’était pas en fureur noire, ce qui était étrange.

« Quel âge avez-vous ? »

Le jeune homme répondit pour les deux :

« J’ai quinze ans. Et Huora en a treize. »

Elle regarda le jeune homme, un sourire aux lèvres.

« Quinze années pour un humain, tu es bien jeune et sans expérience. Je ne me rappelle pas t’avoir déjà maltraité, ni ta petite amie. Pourquoi ? »

Il serra des dents, maintenant coléreux du calme de sa chasseresse.

Pourquoi toutes ces questions, je sais bien qu’elle nous punira de toute façon.

« Pauvre imbécile. Enfin je comprends ton silence. »

Elle se leva et se dirigea quelques mètres plus loin vers le ruisseau. Elle s’accroupit et se pencha au dessus. Le jeune homme en avait profité pour prendre un bâton et s’approcher sans bruit d’Elle.

« Lâche ça, si tu ne veux pas mourir. »

Décontenancé par ceci, il laissa tomber son arme improvisée et regarda la femme qui elle aussi le regardait à présent, s’étant relevée et retournée vers l’adolescent. Elle jeta un rapide coup d’œil vers l’arbre et vit que la jeune fille n’y était plus. Elle sourit et son image se brouilla pour disparaître sous les yeux étonnés du jeune homme. Cinq secondes plus tard, elle réapparut derrière le jeune homme, une dague menaçant sa gorge.

« Je ne joue pas. Tu n’es qu’un imbécile, un verre de terre pour moi, tu n’es rien. Te tuer ne me ferait que perdre de l’argent, mais que sont cent pièce d’or au vue de ma fortune. Ca ne me ferait que gagner du temps et de la tranquilité. Donne moi une raison de ne pas te trancher la gorge. »

Il se taisait, ne sachant quoi répondre. Il ne valait rien, ses parents l’avaient vendu encore bébé, il ne s’en souvenait pas, il le savait grâce à la cuisinière de la demeure qui rapportait ragots et vérités à toutes les oreilles qu’elle croisait. Il serrait les dents, de dépit, de fureur. Une larme coula le long de sa joue gauche tandis que lentement, très lentement la dague ouvrait une entaille dans la chair de son cou. Il adressa une prière à un dieu qui n’existait pas, le dieu de ceux qui servent. Un picotement se fit au niveau de son cou tandis qu’un léger filet de sang coulait sur sa peau pâle. Il pouvait entendre le rire de son assassin, alors qu’il sentait toujours la lame s’enfoncer toujours un peu plus vers sa jugulaire. A présent, ses joues étaient toutes deux le lit de deux fleuves de larmes abondantes. Il entendait toujours rire derrière lui. Au moment où il croyait être enfin emmené par la mort, la lame arrêta sa course et se détacha du cou, laissant une profonde entaille mais qui n’avait touché aucun point vital et qui ne saignait que peu. Doucement une main ferme lui fit faire un demi tour et il se retrouva face à Elle, qui souriait de plaisir. Il ne sentait pas la douleur mais le picotement du sang qui séchait déjà le démangeait. Il regarda la femme de ses yeux humides qui demandait pourquoi elle n’avait pas fini.

« Quel est ton nom ? »

- On me nomme Mignon car personne n’a jugé utile de me nommer et qu’on m’a toujours trouvé ainsi. »

Elle fronça les sourcils, mécontente d’apprendre cela. Sa main vint se poser contre le coup de Mignon qui fut entouré d’une aura blanche ainsi que la main et le bras de la femme. Quelques secondes après, la blessure cicatrisait ne laissant plus aucune trace sauf de sang.

« Va laver ça et rejoins-moi. »

Elle fut surpris du soin et de ses paroles, et comme envoûté par ce changement, il obéit. Quand il fut revenu auprès de la femme, elle était assise à côté d’un feu naissant qui commençait à crépiter. On entendait aussi de faibles sanglots un peu plus loin mais Elle ne fit aucun geste. Le jeune homme n’osant rien dire, s’assit face à elle, dans une position prostrée.

« Mignon, dit-elle pour elle-même. Quel grotesque nom. »

Elle observa le gamin qui fixait les flammes dansantes du feu.

« A partir de maintenant, tu t’appelles Dissan. »

Il la regarda, surpris de cette attention et surtout de la signification du nom en langue commune. Elle ne répondit pas au regard et tira de sa poche un bout de porc salé qu’elle mangea sans en donner à Dissan. Il ne dit rien lui non plus, sortant un bout de pain noir et le mangeant. Une heure passa sans que l’un ou l’autre ne dise quoi que ce soit ou ne bougea de sa position. Enfin l’adolescent regarda plus attentivement la femme et lui demanda :

« Et vous, votre nom ? Nous ne le connaissons pas dans la demeure. On vous nomme Œil Changeant là-bas…

- Car tel est mon nom.

- Ah… ils croient que vous le cachez.

- Mmm… »

Il retourna à ses pensées, ne sachant pas trop quoi dire. Il entendait toujours sangloter un peu plus loin ce qui agaçait Œil Changeant.

« Va chercher cette sotte. Elle m’agace. Fais la terre et donne lui de quoi manger. »

Il se leva et sans un mot se dirigea vers l’origine des pleurs. Huora s’était prostrée dans le trou d’un arbre et y était restée cachée. Quand elle vit arrivé Dissan, elle eu un cri de stupeur et sortit de sa cachette.

« Tu…

-Chut. Tais-toi et viens. »

Elle le suivit, surprise et ils arrivèrent jusqu’au feu. Quand elle vit Œil Changeant elle s’affola mais Dissan la fit taire en la rassurant. Elle se calma, bien obligée, car le regard de la femme n’était guère engageant à désobéir.

« Un mot de ta part… »

La fillette hocha la tête et se blottit sur elle-même, la tête baissée. Il s’assit à un mètre d’elle, pile en face de la femme.

« Pourquoi m’avoir épargné ?

-Pourquoi t’être échappé ? » demanda-t-elle, coupant sèchement la question de Dissan qui baissa la tête. Il ne répondit pas tout de suite. Il regarda Œil Changeant et observa ses yeux, ils avaient virés à un bleu foncé.

« Il le fallait. Je veux être libre. »

Elle regarda le feu, jouant avec une bûche. La jeune fille observait les deux interlocuteurs, surprise et effrayée. Œil Changeant tourna la tête vers elle.

« Dégage. Va où tu veux, je m’en fous, on n’a pas besoin de pleurnicharde comme toi. »

Voyant qu’elle ne bougeait pas, comme tétanisée, elle se leva et tira sa dague alors qu’impulsivement Dissan entama un mouvement de défense. Les yeux de la femme virèrent aux rouges.

« Tu bouges, je te tue vraiment. Et toi, idiote, dégage je te dis où tu meures. »

La fillette partit sans demander son reste vers une direction qu’Oeil Changeant ne prit pas la peine de repérer.

« Pourquoi l’avez-vous fait fuir ? demanda sans attendre Dissan.

-Parce qu’avec elle, tu seras plus esclave qu’avant, regarde la loque qu’elle est ! Elle va se diriger vers la demeure et redevenir ce qu’elle doit être : une souillon. Tu es destiné à autre chose. »

L’adolescent regardait haineusement la femme et respirait fortement, pour montrer son énervement, ce qui fit rire Œil Changeant. Elle se rassit face au jeune homme et le regarda s’énerver pour la gamine. Il finit par dire :

« Qu’attend-on ?

-Quelque chose.

-Peut-être plus de détail ?

-Non.

-Alors je n’ai rien à faire avec vous. »

Il se leva mais une dague atterrit à un centimètre de son pied.

« Assis. »

Il se rassit, n’ayant pas vraiment le choix.

« Tu m’appartiens. C’est moi qui t’ai payé, ce n’est pas pour te voir partir. J’avais mes raisons, sinon le maître s’en serait chargé et tu seras devenu nettoyeur de chiotte.

- Je suis pas grand-chose d’autre. Un larbin coincé dans une cours et qui fait des allers-retours pour vous servir et répondre à vos caprices les plus extravagants.

-Oui. Et…

-Et je n’ai pas envie de vivre ça…

-Et pourtant…

-Et pourtant rien ! Vous m’avez parlé d’une destiné.

-Oui. »

Il la regarda, fulminant de rage. Le tacite de la femme le mettait hors de lui mais il ne pouvait rien dire, ni l’offenser, elle était plus forte que lui et posséder les atouts. Lui non. Au bout d’une dizaine de minutes, elle lui dit :

« Tu es un piètre fuyard. D’une on ne s’enfuie jamais sans armes, il faut être fou pour s’aventurer dans le monde extérieur sans un glaive, un poignard ou une once de don magique dans le sang. »

Il fut à nouveau surpris par cette soudaine intervention.

« Et comment s’armer là-bas ? Je n’ai même pas accès à un couteau de cuisine.

-Héhé ! Evidemment, crois-tu que je ne savais pas que tu allais t’enfuir tôt ou tard. Toutes ces années je t’ai observé travailler pour moi, je voulais voir si tu étais bien celui que je cherchais.

-Arrêtez tous ces mystères ! Celui que vous cherchez, ma destiné. Dites ce que je suis et qui je suis bon sang de bonsoir !

-Reste poli ! dit-elle tout en se levant. Tu n’as pas l’esprit très vif. »

Elle dirigea vers le jeune homme et ramassa la dague qu’elle lui avait jetée aux pieds.

« Tu aurais pu ramasser cette dague, et la cacher. Ou bien me menacer avec…

-Et cela aurait servi à quoi, Œil Changeant ?

-A rien.

-Sauf à me faire encore menacer par vous.

-Exact.

-Pourquoi parlez-vous si peu ? »

Elle ne répondit pas ce qui provoqua le soupir du jeune homme.

« Cette situation est agaçante ! On attend ici, je ne sais quoi et ne pas savoir m’insupporte !

-Tu as bien appris tes leçons apparemment. C’est bien. Il te manque encore les réflexes aristocratiques mais tu parles bien.

-Les réflexes aristocratiques ? »

Une nouvelle fois il resta sans réponse à son interrogation. Il voulut se lever de sa place.

« Bouge pas ! Soit patient ! Encore quelques temps.

-Combien ?

-Tu poses trop de questions. »

Il se rassit et attendit sans plus rien dire.


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