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vendredi 6 juin 2008

Exercice: sang, or, soie, septembre

Ce texte a été écrit dans le cadre d'un atelier écriture au lycée. Le but de l'exercice était d'inclure 4 mots dans un texte. Je l'ai réécrit avant de le poster, corrigeant certaines choses. Mais ce texte a été écrit originellement l'année dernière.


Il se nommait Minya, chinois habitant un petit village pauvre dans la campagne éloignée du littoral, en plein centre du pays, un coin perdu et oublié, une petite route menait à ce hameau mais seul le ravitailleur l’empruntait une fois par mois. Le reste du temps le village était coupé du reste de la Chine. Les enfants n’allaient pas à l’école et ils passaient leur temps à jouer, se roulant dans la boue avec les chiens mi-sauvage, mi-apprivoisé. Les journées étaient monotones pour les villageois. Les adultes travaillaient à leur tâche quotidienne, ceux-ci dans un champ, ceux-là dans la forêt, ce groupe-ci nourrissait les bestiaux, ce groupe-là pêchait à la rivière. Personne ne s’ennuyait mais tout le monde avait la même tâche quotidienne.

Un petit groupe privilégié s’occupait d’une petite industrie spécifique à certaines régions de la Chine, c’était une industrie et un savoir qui remontait à des siècles, même des millénaires. Cette industrie produisait la soie de la plus fine qualité qui existe. C’est la seule richesse que ce village possédait et Minya était l’un des privilégiés qui s’occupait de la production. Sa tâche était de s’occuper de la reproduction des vers qui produisaient la soie.

Elle s’échangeait contre de l’or pur, et le village, malgré sa pauvreté apparente, en avait de grande quantité pour un hameau perdu. Seul le ravitailleur y avait accès et seul lui échangeait les ressources contre de l’or ou autre. Ainsi, lui seul encore pouvait dire à qui voudrait l’entendre que ce village était une mine d’or sans qu’on ait besoin d’y creuser. Il vendit cette information cinq pour cent du butin final.

Le mois qui suivit celui de septembre chez nous, le marchant suivi d’un groupe monté sur des chevaux arriva au village la nuit tombée. Les habitants étaient pour la plupart endormi mais il restait toujours un guetteur dont la tâche était de prévenir le village grâce au tocsin lorsqu’un visiteur arrivait à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit. Ainsi, lorsqu’il entendit les bruits du galop des montures, il sonna et bientôt les hommes du village se rassemblèrent sur la place. Minya était parmi eux.

Quelques instants après, le groupe monté arrivait au grand galop sans faire mine de freiner ce qui affola les hommes qui s’éparpillèrent. Les cavaliers, armés de piques, javelots et arcs ainsi que d’épées pénétrèrent dans la foule sans mal et le sang commença à gicler de toute part, les corps de femmes, enfants et hommes s’effondraient autour de Minya qui s’était caché sous une charrette. Les maisons brûlaient, ainsi que le bâtiment dans lequel les vers étaient gardés avec la soie qu’ils produisaient.

Le chinois n’était guère courageux, tremblant comme une feuille morte. Il ne bougea pas de sa cachette alors que tout le village se faisait massacrer, sa famille, ses amis, tous. Mais qu’aurait-il fait, lui, éleveur de vers à soie ? Ainsi le matin venu, lorsque les bandits furent partis avec l’or du village, les maisons n’étaient que cendre et les hommes, cadavres. Il se releva et contempla ce spectacle avec les yeux d’un coupable de lâcheté, il savait qu’il en était un. Des larmes coulaient le long de ses joues. Il ne savait plus que faire, partir ou rester, mais dans l’un ou l’autre cas, il se serait perdu dans une vie solitaire et coupable. Ils tremblaient tant sa douleur était insupportable. Ses genoux ne purent le soutenir, il se retrouva à terre, toujours pleurant sur son village et ses habitants morts, sur sa vie injuste. Jamais il n’avait été seul, jamais il n’aurait pu imaginer avant tout ceci qu’il serait autant en détresse. Son dos se convulsait sous l’effet des hoquets de sanglots qui le prenaient.

Il était resté quelques heures dans cette position sans pouvoir faire un geste, simplement à pleurer sur son sort et celui de son village. La pluie avait pendant ce temps-là commencé à tomber et le sol s’était fait boueux, lavant la terre des souillures du massacre. Il se releva et commença à marcher sans avoir où il allait.



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