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mercredi 11 novembre 2009

Un Couple Funeste - Chapitre 4 - Once more saved !

Lucien Morel


Je n'ai pas gardé longtemps Thérèse et son bébé mais l'histoire a une suite ou, du moins, avec quelque malchance, aurait pu facilement en avoir une.

Je larguai le sac dans lequel je les avais déposés tous les deux, serrés dans les bras l'un de l'autre, pour que rien ne les sépare avant que leurs os fuient dans les courants, deviennent poreux et légers comme la pierre ponce, s'effritent et disparaissent pour renaître dans la chaux des étoiles de mer. A l'instant où l'eau se refermait sur eux, des portes claquèrent dans le silence de la nuit, des appels retentirent. Sur la berge, des hommes couraient dans ma direction.


- Hé là ! Hé !
- Par là ! Par là !

Sans doute avais-je été aperçu par des ouvriers. Ils me chassaient comme les chiens le lièvre et comme lui je courais en zigzag, à travers les rues nocturnes. Parfois leurs clameurs se rapprochaient dangereusement, puis tout à coup ils semblaient perdre ma trace, je les entendais s'interpeller, se lancer des injonctions, des conseils.

Les murs aux affiches lacérées, les façades aveugles des hangars, les fabriques abandonnées passaient à mes côtés, sur un rythmes de rêve. Ignorant où j'étais, courant éperdument dans le dédale des rues hostiles, je craignais surtout de m'engager dans quelque impasse.

Et soudain, ce fut le choc que je n'attendais pas : mon corps tout entier entra violemment en contact avec quelque chose, en quelques secondes je compris en fait que c'était plutôt quelqu'un. Je ne pris pas le temps de réfléchir d'avantage, je gardai la personne contre moi en lui couvrant la bouche d'une main et me plaqua de dos contre un mur sans lâcher prise, mon autre bras en ceinture autour de sa taille.

Tandis que je tentai de retrouver un rythme normal dans ma respiration, j'eus encore le temps d'apercevoir, à l'angle d'un mur, un groupe d'hommes gesticulant follement sous la lumière d'un réverbère.


Ruth Paine

La journée a été éprouvante, surtout en émotion forte. Lucien Morel qui la mettait dans des états proches d'une transe, ses livres qui étaient partis en restauration chez ce même M.Morel. Depuis qu'elle l'avait rencontré dans les cryptes, il était un peu un fantôme dans sa vie qui l'excitait de manière critique.
Elle savait que ce soir là, elle devrait tuer. Alors elle s'était préparée en faisant une sieste, en rentrant chez elle pour enfiler une tenue adéquate à l'excitation d'un mâle.

Elle alla donc écumer quelques bars et boîtes de nuit pour trouver celui qui la comblera ce soir-là. Et elle tomba dessus alors qu'elle marchait tranquillement dans la rue. Un jeune oisillon de dix-huit printemps qui l'avait regardé la langue presque collée au sol. Elle s'était alors approchée de lui et très rapidement ils s'étaient exilés dans une ruelle tranquille.

Elle prit son temps cette fois-ci, permettant à l'adolescent de goûter des fruits que peu d'homme avait pu même apercevoir. Il n'en était pas à son coup d'essai et le faire dans la rue semblait terriblement l'exciter. Elle se laissa relever la jupe, elle le laissa même y glisser sa main. Elle lui enfila de sa main experte un préservatif avant de le laisser même la pénétrer aussi sauvagement qu'une bête un rut.

Mais elle l'arrêta et finit le reste à sa manière. Puis quand il fut épuisé, elle sortit son couteau et l'égorgea, se tenant dans son dos pour éviter d'être aspergée de sang. Et alors qu'elle réfléchissait au moyen de déplacer le corps et où le cacher, elle fut percutée de plein fouet ce qui lui coupa le souffle. Et elle n'eut pas le temps de le récupérer que son agresseur lui barrait la bouche de la main et se collait à elle.

D'abord sonné, elle entendit des voix crier et comprit bien vite qu'on recherchait l'homme - parce qu'elle sentit que s'en était un. Décidée de ne pas se laisser faire, elle sortit son couteau à peine essuyé et l'appliqua délicatement sur la gorge de l'inconnu en faisant bien attention à ne pas le blesser puis de son autre main, elle baisse celle qui lui couvrait la bouche et murmura :

- Je vous conseille de vous reculer.

La nuit nuageuse ne permettait pas une vision même à si proche visage bien que Ruth fût douée pour voir dans le noir.

Lucien Morel

Je retins presque mon souffle pour ne pas me faire repérer, bien qu'il me semblait en avoir besoin plus que jamais après ma course. J'ignorais presque la personne que j'avais entre les mains, il n'y à a que sa taille fine que mon bras encerclait qui pouvait m'indiquer que c'était une femme.

Puis je retins ma respiration pour de bon en sentant un contact froid contre ma gorge, fort heureusement pour moi, les voix s'éloignaient. Mais, visiblement, il me faudrait m'occuper d'un autre problème à présent. Je laissai ma main s'écarter et défis mon étreinte autour de cette taille fine.

Dans un réflexe lent, je levai doucement les mains pour les mettre en évidence. De toute ma vie, je n'avais jamais porté la moindre arme sur moi et même mes poings n'avaient jamais servi à la moindre violence.

Par un besoin vital et un instinct de survie -hélas-, mon souffle revint de lui même, saccadé, encore épuisé par l'effort que je venais de fournir, plus excité que jamais par la course poursuite, le danger faisait parti de l'ensemble

Une voix, qui était bien féminine, murmura des conseils menaçant. Je ne demandais qu'à reculer, mais un pas en arrière suffit pour que mon dos rencontre déjà le mur derrière moi, je plissai les yeux pour tenter de distinguer les traits de la femme qui me tenait en joue, mais rien à faire, l'effort avait affaibli ma vue et dans cette obscurité je ne distinguais plus grand chose.


- Je n'ai pas la moindre intention de vous vouloir du mal.

Je laissai néanmoins mes mains en évidence pour lui donner une preuve de ma bonne foi.


Ruth Paine

L'inconnu s'était docilement écarté et avait mis ses mains bien en évidence pour que Ruth s'aperçoivent qu'il ne lui voulait rien. Elle s'en était bien rendue compte car elle l'avait senti paniquer à l'approche des voix puis détendu lorsqu'elles s'étaient éloignées. Enfin détendu oui et non, avoir un couteau sous la gorge n'est pas ce qu'on peut appeler une détente.

Elle était encore toute excitée de son meurtre et de ses préliminaires et elle pouvait encore en manger un voir deux comme ça, bien qu'elle n'ai plus envie de tuer. Elle se demandait ce que ça faisait de coucher sans tuer. Elle ne le savait pas.

Lorsqu'il parla elle crut reconnaître une voix familière mais elle avait un doute. Elle avait retiré le couteau de sous la gorge mais le gardait quand même en main. Il n'avait pas l'air dangereux mais il était tout de même poursuivi par plusieurs personnes. La question dépassa alors ses lèvres :

- Que vous voulez ces hommes ?

Elle comprenait que sous l'effet du danger il se soit précipité à faire taire la femme mais elle avait du mal à se laisser dominer, mais en même temps cela avait été si excitant. C'était sûrement les restes de ses ébats. Elle essaya de scruter un peu mieux le noir dans l'espoir d'apercevoir un trait du visage de son percuteur.

Elle décida en même temps de replier le couteau, elle sentait qu'elle avait un être inoffensif en face d'elle.

- Je range mon couteau, baissez les mains, je ne compte pas non plus vous faire de mal...

"... pour le moment."

Elle respira un bon coup pour calmer la douleur post-traumatique puis se frotta l'endroit touché.

- Vous deviez être totalement paniquer pour donner un tel coup. A moins que vous ne soyez rugbyman.

Elle essayait de se donner un peu de contenance, de se rassurer elle-même parce qu'un corps gisait quelques mètres à côté d'eux et parce qu'elle venait de plaquer un couteau sous la gorge d'un inconnu affolé. Elle préférait les hommes consentants...

Lucien Morel

Mon attention se portait plus sur les voix qui s'éloignaient trop lentement à mon goût. Je n'avais pas capté la première question de la jeune femme, la tête à moitié tournée vers mon épaule, à la sortie de la ruelle et l'oreille attentive de ce côté là uniquement. Ni mon cœur, ni ma respiration ne semblaient décidé à se calmer, en plus de ça, le sang affluait beaucoup trop dans mon corps, autant que l'adrénaline dans les circuits de mon cerveau. Je me mordis la lèvre sous ces effets, la peur est si agréable parfois.

Quand la jeune femme ouvrit la bouche à nouveau, je baissai mes mains, soulagé de ne plus être menacé. Je repris mon souffle en inspirant un bon coup, la jeune femme en faisait autant, j'avais dû l'effrayer avec cette rencontre un peu brusque. Tout ce que j'avais voulu, c'était qu'elle ne me fasse pas remarquer. En plus, je ne m'attendais pas à croiser quelqu'un dans les environs à cette heure. Un ivrogne peut être ou un clochard à la limite. Mais cette jeune femme était loin de tout ça.

J'entendis sa voix à nouveau, que les vivants sont bruyants. Dans un nouveau réflexe, j'ai levé ma main pour la poser et non plus la plaquer brusquement sur ses lèvres. De l'autre main, j'ai levé l'index sur mes lèvre pour lui imposer le silence. Dans ce même geste, je me suis penché, épaule contre le mur et j'ai sorti la tête de la ruelle, à la lumière de réverbère. J'inspectais les environs pour vérifier que la voix était libre.

Enfin je pouvais presque respirer normalement. Alors, doucement, j'ai éloigné ma main, de moi-même cette fois et je me suis laissé glissé contre le mur pour m'assoir un instant. Je me mordis à nouveau la lèvre en relevant la tête pour laisser celle-ci reposer contre le mur.

- Je pourrais, moi aussi, vous poser tout à tas de questions...


Ruth Paine

La jeune femme parlait trop fort et l'inconnu lui imposa de nouveau le silence un peu moins brusquement. Elle se tut, acceptant l'interdiction momentanée. Si l'homme était en danger, le retrouver en sa compagnie l'aurait mise elle-aussi en danger, d'autant plus qu'un corps était là, tout près.

Elle retint presque sa respiration pour faire le moins de bruit possible, bizarrement cette situation lui était plus agréable qu'elle ne l'aurait pensée, comme sa rencontre dans les cryptes avec ...

Les images se brouillèrent, il ne fallait pas qu'elle y repense maintenant. Elle sut à ce moment qu'elle ne serait jamais rassasié tant qu'elle n'aurait pas...

Il la coupa dans ses réflexions en éludant la question avec intelligence, mais elle avait de la répartie.

- Sauf que je ne suis pas poursuivie par une meute d'hommes apparemment en colère. Ca fait une sacré différence je crois.

Elle chuchotait, toujours dans le but d'attirer le moins possible l'attention.

- Pour ma part je me promenais et je me suis perdue, distraite par le silence de la nuit. Jusqu'à ce que vous me fonciez délicatement dessus.

C'était son tour de s'accroupir, épuisée d'un coup.

- Que diriez-vous de continuer notre discussion autre part. Le coin est pas rassurant.

Elle avait surtout envie d'éloigner un potentiel témoin.

- Et puis si meute cette refait son apparition, je trouverais bien quelque chose pour les faire fuir.

Son ton était sérieux, elle ne souriait pas, bien au contraire. Elle était soudainement fatiguée et se sentait de prendre une journée de congé demain. Les émotions de ces dernières vingt-quatre heures l'avait vidée de toute énergie. Cette pensée lui arracha d'ailleurs un bâillement.

Lucien Morel

A vrai dire, la poursuite nocturne m'avait beaucoup affecté, mais si elle n'avait fait que ça... Je flairais le danger, peut-être devais-je le craindre, et pourtant, il me donna l'impression que je n'avais pas pu profiter de mon plaisir de ce début de soirée, avec Thérèse et son bébé.

Je n'ai pas jugé nécessaire de répondre aux explications de la jeune femme, au fur et à mesure que celle-ci parlait, j'avais l'impression de retrouver un ton familier. Elle me proposa de changer de coin mais je préférais rester là pour le moment, le temps que ça passe.

Sa dernière phrase m'arracha un léger rire discret, on ne peut plus nerveux, mais il m'avait tout de même surpris, comme il aurait sans doute surpris n'importe quelle personne qui m'avait déjà rencontré. Et oui, l'antiquaire morne et sombre du bazar des rêves était, lui aussi, capable d'hilarité soudaine.

Je ne me moquais pas, pas du tout même. Sa phrase m'avait ramené de bons souvenirs, pourtant si douloureux. La chasse que j'avais subie le soir de ma rencontre avec Suzanne et du subterfuge qui m'était passé par là tête pour laisser passer mes poursuivants à côté de leur proie ? Ah~... Suzanne. Je ne passe guère de jour sans évoquer Suzanne, ses seins aux larges auréoles beiges, son ventre creux, suspendu comme une tente entre les deux pointes des hanches, son sexe dont le seul souvenir suffit à émouvoir le mien. Aujourd'hui, l'ivoire de ses os, à quels coquillages marins intégré ?

Encore une fois, mon esprit divaguait beaucoup trop et éveillait, malgré moi, quelque chose qui sommeillait plus bas que mon ventre, à l'endroit où j'étais un homme. Il fallait que je me calme, il fallait que je me force à penser autre chose. Réfléchir, éviter Suzanne, ma douce Suzanne, la belle....directrice ?! Pourquoi diable fallait-il que je diverge là dessus à un moment pareil, et surtout dans un tel état.

Comme pour briser le silence qui s'était installer, pour forcer mon esprit à se remettre au garde à vous plutôt qu'à ce qui s'était éveillé en dessous de la ceinture, je me mis à toussoter, mes joues s'empourprèrent, digne de celle d'un pauvre puceau, la fièvre montait doucement, il me fallait une douce chaire froide pour me rafraichir.

Je dus m'y reprendre à deux fois, prenant un mauvais appui contre le mur, pour essayer de me relever et dans un mouvement incertain, j'ai vacillé vers la jeune femme, m'écrasant presque sur ses jambes, la tête mal - bien ?- placée, ma main s'étant retenue à la première chose à portée pour me permettre de me redresser directement.


- Pardon ! Je... décidément...


Ruth Paine

Le rire de l'inconnu surprit la demoiselle. Elle entendait à l'accent qu'il prenait que c'était plutôt un rire nerveux. Il ne dit cependant rien et essaya plutôt de se relever. Ruth voyait l'ombre se mouvoir avec difficulté et gaucherie au point de venir de nouveau s'écraser sur la meurtrière. Sa tête vint s'écrasait sur un de ses seins ce qui lui arracha un petit cri de surprise plus que de douleur.

Une fois debout, l'inconnu s'excusa, confus. A première vue, Ruth se dit qu'il ne devait pas être très souple et sportif pour avoir du mal à se relever. Elle le fit avec facilité malgré ses talons aiguilles d'une hauteur déconcertante. Elle voulait absolument partir de cet endroit, c'était beaucoup trop dangereux de risquer d'avoir un témoin. Elle insista pour partir avec l'homme qui lui avait foncé dedans, surtout que rester ici, pour lui, n'était pas une bonne idée.

- Il faut s'en aller. Surtout pour vous, ces hommes avaient vraiment pas l'air commode et je me fiche de savoir ce que vous leur avez fait mais ils finiront par vous trouver. Alors venez avec moi et allons-nous en.

Son ton s'était fait plus autoritaire et elle avait parlé un peu plus haut pour l'appuyer encore. La situation était plutôt délicate et ce soir elle avait eu sa dose de sang, elle n'avait plus envie d'égorger qui que ce soit même si cette inconnu lui importait peu, pas du tout même. Elle savait qu'elle avait déjà accéléré le rythme et que la police finirait bien par la retrouver car elle aurait fait une quelconque erreur.

Elle avait bien un moyen de brouiller les pistes, peut-être même qu'elle s'arrêterait de tuer, bien qu'elle en doute fort. Ces pensées qui traversaient l'esprit de Ruth à la vitesse de la lumière la ramenèrent à Lucien Morel.

"C'est pas vrai... il faudra qu'il me fiche la paix lui..."

Même si au fond elle n'en avait pas envie. Leurs différentes rencontres s'étaient faites dans des circonstances totalement inattendues et plutôt étranges. Même le simple rendez-vous professionnel s'était transformé en fiasco psychologique. Elle se demandait ce que pensait l'antiquaire de ces choses, il a toujours l'air étrange et un peu absent, comme vivant dans un monde à part. Il la fascinait totalement. Déjà petite fille, les hommes mystérieux la rendaient curieuses. Mais aujourd'hui jeune femme, elle était curieuse mais de beaucoup d'autres choses en plus.

Que cache-t-il derrière son costume aussi antique que les objets peuplant sa boutique ?

Elle secoua la tête et se fut à son tour de toussoter avant de rougir. Il ne fallait pas qu'elle se mette à penser à tout ça maintenant. Décidée à se faire obéir, elle s'empara de la main de l'inconnu et se dirigea vers les pavillons chester plus loin en ville. Elle ne lui demanda pas où il voulait aller, elle avisera quand ils seront sortis des quais.

Lucien Morel
MORTEL - Antiquaire

J'eus à peine le temps de me lever que je fus saisi par la voix de la jeune femme qui se faisait plus forte. L'impression que cette voix m'était familière augmenta elle aussi au ton qu'elle prenait. Puis un petit moment de silence, cela me ramenait d'autres souvenirs liés à cette même voix.

Chaque fois, je l'entendais lointaine et puis dans un sursaut elle m'arrachait à mes pensées avant de laisser retomber le silence... C'était comme avec cette directrice justement. Quand la jeune femme toussota, il n'y eut presque plus aucun doute, juste de la curiosité. Encore une fois, si le silence s'était installé, c'est qu'elle était plongée dans ses pensées, à moins que je ne me trompe complètement de personne.

Lorsqu'elle s'empara de ma main, l'image brève de mon geste à la bibliothèque me revint en mémoire. J'avais eu ce réflexe pour la retenir mais elle, le faisait pour m'entraîner. A la lumière faible des réverbères, j'ai ramené tout le corps auquel était rattachée cette main vers moi, entourant encore une fois cette taille fine de mon autre bras.


- ....A quoi pensiez-vous... ?


Ruth Paine

Un frisson d'une incroyable intensité lui parcourut l'échine. Elle ne savait si c'était dû à sa taille entouré d'un bras masculin alors qu'elle ne s'y attendait pas ou bien au fait qu'elle reconnut la voix, surtout la question. La même voix, la même question, la même personne...

Elle écarquilla les yeux quand à la lueur des réverbères elle vit qui était l'inconnu. Elle resta interdite une dizaine de secondes, les mains posées sur les épaules de l'antiquaire, les yeux aussi parlant que les mots. Puis elle se ressaisit, enfin presque, une fois de plus les mots dépassèrent ses lèvres avant qu'elle n'ait pu les contrôler.

- A vous ...

Sa gorge se serra. Ainsi tenu par le cœur de ses fantasmes, elle sentait une chaleur oppressante la saisir. Son sang bouillonnait alors qu'elle tentait de réguler sa température en inspirant profondément, s'imprégnant de l'air frais de la nuit.

Cependant, irrémédiablement, ses joues rosirent et elle s'en voulait de ne pas pouvoir contrôler son corps qui s'abandonnait à des réactions plutôt gênantes. Elle ne bougea pas, laissant le contrôle à Lucien. De toute façon, elle était paralysée de stupeur et de... désir. Elle réussit cependant articuler :

- Je... Vous... Qu'est-ce que vous faites par ici ?

Elle en avait presque oublié la vilaine meute qui poursuivait l'antiquaire ainsi que le corps qu'elle avait laissé à quelques pas. De sa main elle reprit celle qui était relié au bras qui la retenait.

- Ne restons pas ici, souffla-t-elle. Elle ne réfléchit pas une seconde de plus et se dirigea vers sa maison. Elle avisera devant la porte. Elle ne voulait pas tomber sur les hommes qui poursuivaient Lucien... Lucien... Son esprit commençait encore à divaguer alors qu'elle n'avait jamais été aussi proche que lui. Elle marchait à une telle vitesse qu'elle en courait presque.

Ils arrivèrent dans une rue fréquentée par quelques voitures et taxis. Elle en appela un et s'y engouffra sans laisser le choix à Lucien. Elle le fit monter, le tenant toujours par la main, qu'elle aurait pu lâcher mais elle n'y avait même pas pensé. Elle indiqua l'adresse au chauffeur. Il n'en aura que pour cinq minutes durant lesquelles elle respira pour calmer son émotion et sa course. Elle ferma les yeux pour ne pas les poser sur l'antiquaire à côté d'elle.

Elle ne dit rien, ne voulait pas ouvrir la bouche de peur de dire une bêtise, de se trahir plus qu'elle ne pouvait l'avoir fait aujourd'hui... à deux reprises. Elle se maudit intérieurement mais c'était fait, bien que son cerveau ne fonctionnât plus vraiment puisqu'elle n'y avait encore fois pas réfléchi, il ne devait pas habiter aux pavillons mais au dessus de sa boutique. Tant pis, elle demanda pendant que le taxi pénétrait dans sa rue :

- Vous venez chez moi ?

Plus simple on meurt, elle ne l'invitait pas à boire un verre, le chauffeur aurait pensé "le dernier verre avant de se retrouver au lit". Elle n'en avait jamais partagé un seul avec l'antiquaire. Ils avaient partagé une bougie dans les cryptes, c'est tout. Elle devint aussi pâle qu'un drap blanc, elle réagissait comme une jeune fille de quinze ans qui a son premier rendez-vous...

By Miss Belzy & Gwen Paine

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